Une troisième collection importante de pierres gravées, quoiqu’aujourd’hui plus confidentielle que les deux premières, a été rassemblée par le graveur italien Tommaso Cades (1772 ou 1775 – apr. 1850), chargé à partir de 1829 de créer des moulages pour l’Institut de correspondance archéologique, fondée cette année-là et devenue en 1871 l’Institut allemand de Rome. L’artiste, implanté à Rome sur la Via del Corso où il vendait également des copies de pierres antiques, très prisées à cette époque comme souvenirs d’une visite de la ville éternelle, a produit pour l’Institut deux séries de moulages de pierres antiques. La première est la collection des Impronte gemmarie dell’Istituto (« Empreintes de gemmes de l’Institut »), organisée en séries de cent moulages, dites « Centurie », qui reproduit des pierres trouvées à cette époque dans les fouilles de Vulci et de Cerveteri et publiées par ailleurs dans le Bullettino dell’Istituto. La seconde, parfois dite aussi Impronte gemmarie, porte à proprement parler le titre de Gemme cavate accuratamente dalle più celebri gemme incise allora conosciute che esistono nei principali Musei e Collezione particolari di Europa (« Gemmes précisément gravées, des plus célèbres gemmes incisées alors connues qui existaient dans les principaux musées et collections privées d’Europe ») ; en 78 volumes, dont 53 volumes concernent l’Antiquité, elle est aujourd’hui conservée à l’Institut allemand de Rome avec son catalogue manuscrit. Muret a dessiné au moins deux pierres de cette deuxième série, dont le bacchant ci-contre.
Notre dessinateur a donc pleinement profité de l’engouement antiquaire pour les pierres gravées qui lui ont donné accès à un grand nombre de reproductions de pierres dans lesquelles il a pu choisir les motifs qui l’intéressaient, lorsqu’il ne les trouvait pas dans la collection du Cabinet des médailles : cette dernière est de loin la source la plus important de Muret, avec 78 pierres dessinées. Néanmoins, cet engouement général s’est aussi accompagné d’un manque de littérature proprement scientifique sur le sujet : la tradition amateure s’est maintenue plus longtemps pour la glyptique que pour la sculpture grecque et romaine, et la connaissance des pierres a ainsi été dominée par des considération esthétiques et l’évocation d’un passé classique. La considération scientifique de cet objet d’étude est surtout due à Adolf Furtwängler, qui a publié sa magistrale étude Die antiken Gemmen en 1900, plusieurs décennies après la mort de Jean-Baptiste Muret. Aujourd’hui encore, il s’agit d’un champ d’étude assez peu présent en France, et du reste peu représenté et assez séparé du reste de l’histoire de l’art antique dans le reste du monde.